Défini et conceptualisé par la naturaliste américaine Janine Benyus en 1971, le biomimétisme appelé aussi bio-inspiration consiste à s’inspirer des solutions et inventions produites par la nature pour innover de façon durable.
La vie sur terre est apparue il y a 3,8 milliards d’années, l’homo sapiens, lui, est arrivé il a y a seulement 200 000 ans. Les experts et les génies de la durabilité sont tout autour de nous... dans la nature. Face aux défis (pollution globale, épuisement des ressources, changement climatique, effondrement de la biodiversité...), il paraît judicieux de s’inspirer de la nature pour poursuivre notre évolution de façon durable, respectueuse de l’environnement et compatible avec la préservation de notre biosphère : voilà le principe fondateur du biomimétisme.
Le vivant a mis au point des « technologies » et des stratagèmes extrêmement sophistiqués et efficients, des écosystèmes intelligents, fertiles, sans rejets polluants ni déchets. Il apparaît particulièrement pertinent de chercher à mieux cerner et inventorier les trois niveaux d’inspiration généralement attribués au biomimétisme et leurs applications concrètes. On peut s’inspirer :
- des formes et des matières, comme les ailes d’avion conçues sur le modèle des ailes d’un rapace pour améliorer le vol et réduire la consommation de carburant ou bien encore le train à très grande vitesse japonais, pour lequel le bec du martin-pêcheur a servi de modèle ;
- des processus et des méthodes. Installés dans des zones de forte amplitude thermique entre le jour et la nuit, les termites sont parvenus pour survivre à garder une température constante et tempérée au sein de leur habitat. Au Zimbabwe, l’architecte Mick Pearce s’est inspiré de cette forme de climatisation : il a réduit la consommation d’énergie thermique de son bâtiment de 90 % ;
- des écosystèmes, de leur fonctionnement et surtout de leur efficience productive. Au Danemark, le complexe industriel de Kalundborg s’est développé selon un modèle économique écosystémique et circulaire, les déchets des uns devenant ressource pour les autres.
En France, l’intérêt pour le biomimétisme se développe rapidement. De nombreux laboratoires de recherches, des collectivités publiques, des cabinets d’architectes ou de designers, des entreprises de toutes tailles et de tous secteurs d’activité, conscients des enjeux et des urgences écologiques, souhaitent innover de manière durable et réduire radicalement leur consommation d’énergies et de ressources naturelles.
La question du biomimétisme alimente chaque jour davantage les réflexions et les débats sur notre modèle de développement. En 2007, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques formulait le constat suivant : « Les processus industriels sont coûteux en énergies, en matières premières et peu sélectifs. L’évolution a produit des solutions naturelles beaucoup plus sophistiquées ». En décembre 2012, le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) organisait un colloque intitulé : « Recherches bio-inspirées : une opportunité pour la transition écologique ? » réunissant industriels et naturalistes... « La biodiversité est une extraordinaire boîte à outils que nous n’avons même pas fini d’inventorier » concluait le professeur Gilles Boeuf, initiateur de l’événement. Enfin, en conseil des ministres du 26 mars 2014, le ministre de l’Écologie y faisait référence dans sa présentation du projet de loi relatif à la biodiversité.
Fort de ces constats et de leur cohérence avec nos enjeux écologiques et énergétiques, et aussi au regard de nos engagements nationaux (SNB) et internationaux (Nagoya) sur la biodiversité,la section de l'environnement du CESE souhaite réaliser une étude sur ce thème. Ses travaux permettraient d’expliquer et de diffuser cette nouvelle notion de biomimétisme, de faire partager ses méthodes, d’explorer ses avancées, d’identifier ses acteurs, d’évaluer l’état de la recherche fondamentale et appliquée, scientifique et industrielle, et d’envisager des approches transversales.
La nature et le vivant sont déjà des sources d’inspirations. Dans la nature, les organismes vivent en équilibre dynamique avec l’ensemble de l’écosystème. Il conviendra d’identifier le potentiel mais aussi les limites, les contraintes et les risques éventuels de la démarche. L’étude permettrait de s’assurer que cette nouvelle approche ou discipline est une véritable opportunité pour nourrir notre créativité et notre inventivité, et un atout pour accompagner efficacement les collectivités publiques et la société civile dans leurs efforts de transition énergétique et écologique.