Par Philippe Clergeau, Professeur en écologie urbaine, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) – Sorbonne Universités
Des territoires où les oiseaux et les insectes se font de plus en plus rares, des disparitions d’espèces inquiétantes et très rapides que de nombreuses études qualifient de « sixième extinction de masse »… Ces derniers mois, les rapports scientifiques relayés par la presse se sont multipliés pour tirer la sonnette d’alarme sur l’état de la biodiversité.
Si l’accent est souvent mis sur les espèces en danger, il faut souligner que la notion de biodiversité implique aussi (surtout ?) l’idée des relations entre espèces ; et entre ces espèces et leur environnement. L’ampleur du phénomène dépasse donc leur seule survie et concerne tout autant les fonctionnements écologiques sous-jacents et les « services » que la nature rend à l’homme (comme la pollinisation, la santé physique et mentale, la régulation des pollutions, etc.).
En dehors des grandes causes animales emblématiques, soutenir les actions de végétalisation les plus utiles aux hommes paraît tentant ; mais cela se fait la plupart du temps sans prise en compte de la biodiversité. Nombre de municipalités affichent ainsi le souhait de développer la nature en ville en y rattachant la sauvegarde d’une biodiversité en déclin à plus grande échelle… en se contentant d’un simple verdissement.
Il y a pourtant une différence de taille entre opérer un verdissement urbain et favoriser la biodiversité.
Pour un vert qui dure
Depuis le Grenelle de l’environnement de 2007, le développement d’une écologie urbaine a fait florès. Essentiellement ciblées sur les régulations des pollutions et sur la réduction des dépenses énergétiques, les gestions municipales et l’urbanisme en ont oublié les grands processus dévastateurs pour la biodiversité, comme l’étalement urbain et la destruction des habitats.
Les politiques de verdissement intramuros sont évidemment une bonne chose, à la fois pour la qualité du cadre de vie et pour la reconnexion des citadins avec la nature. À ce titre, le succès de la plate-forme Plante & Cité – qui vient de dépasser les 520 adhérents, dont près de 200 collectivités territoriales – est un exemple de cette recherche d’innovation et de méthodologie pour mieux conduire le végétalisation en ville.
La notion de biodiversité implique cependant une dimension plus fonctionnelle : il faut tendre vers davantage de diversité spécifique et de relations entre les espèces. Et l’enjeu de favoriser la biodiversité – par rapport à un verdissement que les paysagistes et les municipalités savent déjà bien faire – permet surtout d’envisager la notion de durabilité. Ainsi, les grandes pelouses, les alignements de platanes ou les toitures de sedum constituent autant de monocultures qui pourront se révéler fragiles face aux aléas climatiques ou sanitaires.
Une diversité d’espèces ayant des relations entre elles s’avère bien plus résistante ; elle apporte une certaine stabilité aux chaînes alimentaires, aux systèmes, aux paysages urbains. Une ou des espèces peuvent disparaître sans que toute la plantation soit détruite...
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.
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