Une étude internationale, coordonnée par le Professeur Callum Roberts (Université d’York) et à laquelle a participé le chercheur de l’IRD Philippe Cury, montre que les Aires marines protégées (AMP) jouent un rôle dans l’atténuation des effets du changement climatique et peuvent favoriser l’adaptation des populations marines et humaines. Ces résultats, publiés dans la revue PNAS le 5 juin 2017, ont été présentés lors de la conférence internationale sur les océans, organisée à l’ONU du 5 au 9 juin 2017.
Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a montré que les émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique sont responsables du changement climatique, qui cause de forts impacts sur les océans et les écosystèmes marins notamment. Une des stratégies de conservation et de gestion des océans les plus efficaces reste la création des Aires marines protégées (AMP). Celles-ci couvrent pourtant moins de 4 % de la surface des océans dans le monde à l’heure actuelle.
Conçues pour réparer les dommages de la surexploitation sur les stocks de poissons et leurs habitats, et protéger la biodiversité, elles ont démontré leur efficacité dans ces domaines (bien que les bénéfices dépendent de la gestion et de la mise en œuvre effective des règles de protection). Cependant, jusqu’à présent, la communauté scientifique ne s’était pas intéressée au rôle joué par les AMP dans l’atténuation et l’adaptation aux impacts du changement climatique.
L’efficacité des AMP contre le changement climatique
Dans cette étude, l’équipe internationale a réalisé un travail de synthèse de plus de 140 publications scientifiques sur les bénéfices des AMP. Tout d’abord, elle révèle que les AMP bien gérées et durables peuvent aider les écosystèmes marins et les populations à résister et s’adapter à cinq impacts majeurs du changement climatique : acidification des océans, augmentation du niveau de la mer, intensifications des tempêtes, changements dans la distribution des espèces, baisse de la productivité des océans et de l’oxygène disponible.
Ensuite, les chercheurs ont étudié le rôle des AMP dans l’atténuation du changement climatique. Les océans jouent en effet un rôle fondamental dans la régulation du climat mondial, en agissant comme "puit de carbone" , grâce aux habitats comme les mangroves, les herbiers marins, les vasières, les marais salants (…), qui stockent le carbone organique lors du processus de photosynthèse. En protégeant et renforçant ces habitats, les AMP préviennent ainsi leur destruction et par conséquent la libération du carbone stocké dans les sédiments marins.
Les réserves marines permettent également de protéger les espèces et les écosystèmes des pressions humaines comme la surpêche, le chalutage de fond ou l’exploitation commerciale des fonds marins, qui ont des conséquences néfastes sur le cycle du carbone. Les réserves favorisent ainsi le rétablissement de la diversité génétique, le maintien des fonctions écologiques, des services écosystémiques, et ainsi la résilience et l’adaptation des écosystèmes marins.
En agissant comme zone "refuge" pour la faune dans le contexte du changement climatique, elles pourraient prévenir l’extinction de certaines espèces et aider à la recolonisation de zones fragilisées, comme les mangroves ou les récifs coralliens.
Vers une spatialisation du milieu marin ?
L’équipe souligne que les AMP constituent une stratégie d’adaptation durable et efficace économiquement pour protéger les océans des perturbations liées au changement climatique, à l’échelle locale et globale. Les réserves améliorent les perspectives pour la résilience de l’environnement et des populations qui en dépendent . "Les AMP pourraient faire partie des engagements nationaux et internationaux d’atténuation et d’adaptation au changement climatique. Le soutien des gouvernements et des agences de développement est ici essentiel", affirme Philippe Cury, chercheur à l’IRD et co-auteur de l’étude.
Cette étude apporte un éclairage nouveau pour les décideurs, qui travaillent sur les stratégies de gouvernance des océans. Elle permettra de nourrir la réflexion sur la spatialisation du milieu marin (détermination de zones particulières qui encadrent les différents usages), conduite notamment par l’ONU dans le cadre du 14e Objectif de développement durable (ODD).
Communiqué de l'IRD
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[ODD2030-14]
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