Beaucoup de travaux récents portent sur le déclin des insectes pollinisateurs, au premier rang desquels figurent les abeilles sauvages et l’abeille mellifère, tant en abondance qu’en diversité. Mais rares sont les études qui examinent les conséquences du déficit potentiel de pollinisation qu’il engendre en termes d’impacts sur les productions agricoles et donc sur la sécurité alimentaire. Mis à part la modélisation, quelques études empiriques se sont intéressées ces dernières années à l’effet du niveau de pollinisation sur les cultures, mais la plupart étudient des fleurs individuelles, des rameaux ou des plantes isolées en pot, de sorte qu’il est très difficile d’extrapoler ces résultats en termes de rendement pour l’agriculteur.
Une équipe internationale impliquant l’Inra et constituée de 35 chercheurs, a appliqué le même protocole de terrain1 sur 344 parcelles représentant 33 types de cultures dans 12 pays à travers le monde (principalement Afrique, Asie et Amérique du sud) sur 5 ans. Elle a ainsi réussi à quantifier, à une échelle globale, les relations entre rendements agricoles d’une part (en kilos par hectare) et abondance et diversité de la faune pollinisatrice d’autre part. Les chercheurs ont largement pris en compte les petites exploitations agricoles dans les pays en développement, celles-là mêmes qui ont été ignorées dans la plupart des études antérieures alors qu’elles jouent un rôle clé dans la sécurité alimentaire de la population mondiale.
Les scientifiques ont montré que les déficits d’insectes pollinisateurs sont aujourd’hui responsables d’une proportion importante du déficit de rendement dans ces cultures et ce, même après avoir pris en compte les principales autres variables environnementales et agronomiques (comme le niveau d’intensification et le niveau de dépendance de la culture à la pollinisation par les insectes). Ainsi, l’abondance des insectes pollinisateurs contribue à elle seule à expliquer 31 % en moyenne du déficit de rendement dans les parcelles de moins de 2 hectares. Dans les parcelles plus grandes où la diversité de la faune pollinisatrice est souvent plus faible avec une large prédominance de l’abeille mellifère, les chercheurs ont trouvé un gain de productivité similaire (moyenne 30%) lorsque la faune pollinisatrice est diversifiée. Mais lorsque cette diversité est faible, le gain de productivité est nul de sorte que globalement, lorsque l’on augmente le nombre mais également la diversité des insectes pollinisateurs, on accroît le rendement des cultures de plus de 20 % en moyenne à l’échelle mondiale. Ces résultats mettent donc en évidence l’impact du déficit des populations d’insectes pollinisateurs à une échelle mondiale.
L’humanité doit aujourd’hui relever un double défi : d’abord, produire des denrées alimentaires pour satisfaire la demande croissante d’une population qui augmente ; mais également produire cette nourriture de façon acceptable sur le plan environnemental et social. L’intensification écologique, c’est-à-dire l’amélioration du rendement des cultures en s’appuyant sur la biodiversité, a été proposée comme une voie durable pour répondre à ces défis. Dans ce contexte, les résultats obtenus dans cette étude montrent que cette intensification écologique (qui permet d’améliorer l’abondance et la richesse de la faune pollinisatrice) crée des situations mutuellement bénéfiques pour la biodiversité et pour le rendement des cultures. Ce mode de production contribue ainsi au développement de systèmes agricoles durables, y compris dans les petites exploitations des pays en voie de développement.
Communiqué de l'Inra
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Source : Inra
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