L'Académie des sciences a remis à Madame Valérie Pécresse,
Ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, le rapport sur le
changement climatique annoncé à l'issue du débat du 20 septembre 2010, organisé
en réponse à la saisine de la Ministre. Ce texte est une synthèse des
interventions et discussions qui ont eu lieu lors de ce débat, des
contributions écrites qui l'ont précédé ainsi que des commentaires qui l'ont
suivi.
L'académie considère que la Science peut tenter d'apporter
des réponses autorisées, même si elles ne sont que partielles ou temporaires,
dès lors qu'elles sont guidées par le souci d'objectivité qui doit présider à
toute démarche scientifique.
- Plusieurs indicateurs indépendants montrent une
augmentation du réchauffement climatique de 1975 à 2003 :
- L'augmentation de la température de surface sur la Terre
est de 0,8 ± 0,2 °C depuis 1870
- La température des océans montre une augmentation moyenne
globale depuis quelques décennies.
- La réduction de la surface des glaces océaniques
arctiques.
- Le recul des glaciers continentaux
- Les calottes polaires de l'Antarctique et du Groenland
ont un bilan total de masse négatif depuis une dizaine d'années
- Le niveau moyen des océans, s'est élevé à un rythme de
0,7 mm/an entre 1870 et 1930 et d'environ 1,7 mm/an après 1930, élévation
approximativement dues, pour un tiers à la dilatation de l'océan consécutive au
réchauffement et, pour les deux autres tiers, aux glaces continentales à
parts quasi égales, fonte des calottes polaires du Groenland et de
l'Antarctique d'une part, et fonte des glaciers continentaux d'autre part.
- Les indicateurs biologiques, tels que les déplacements de
populations animales terrestres ou marines et l'évolution des dates d'activités
agricoles saisonnières, montrent aussi la survenue d'un réchauffement
climatique.
- Cette augmentation est principalement due à l'augmentation
de la concentration du CO2 dans l'atmosphère. L'augmentation de CO2 et, à un moindre degré,
des autres gaz à effet de serre, est incontestablement due à l'activité
humaine. Le dioxyde de carbone (CO2) : sa concentration augmente continûment depuis
le milieu du XIXe siècle, en raison principalement des activités industrielles,
passant de 280 ppm vers 1870 à 388 ppm en 2009. Le taux de croissance mesuré
depuis 1970 est environ 500 fois plus élevé que celui observé en moyenne sur
les 5 000 dernières années. Augmentation due pour plus de la moitié à la
combustion des combustibles fossiles, le reste aux déboisements massifs et pour
une faible part à la production de ciment. Le méthane (CH4) : dû notamment aux
fermentations diverses (zones humides, ruminants, déchets domestiques,
biomasse, ...), aux fuites de gaz naturels et à la fonte du pergélisol, sa
concentration s'est accrue de 140 % sur la même période. Elle semble cependant
stabilisée depuis 2000. Le protoxyde d'azote (N2O) : dû en grande partie aux
activités agricoles (dont la biodégradation des nitrates agricoles dans les
milieux souterrains anoxiques), sa concentration a augmenté de 20 % sur la même
période.
- Elle constitue une menace pour le climat et, de surcroît,
pour les océans en raison du processus d'acidification qu'elle provoque qui a
des conséquences négatives importantes sur la faune et la flore océaniques
- Cette augmentation entraîne des rétroactions du système
climatique global, dont la complexité implique le recours aux modèles et aux
tests permettant de les valider.
- Les mécanismes pouvant jouer un rôle dans la transmission
et l'amplification du forçage solaire et, en particulier, de l'activité solaire
ne sont pas encore bien compris. L'activité solaire, qui a légèrement décru en
moyenne depuis 1975, ne peut être dominante dans le réchauffement observé sur
cette période.
- Des incertitudes importantes demeurent sur la modélisation
des nuages, l'évolution des glaces marines et des calottes polaires, le
couplage océan%u2010atmosphère, l'évolution de la biosphère et la dynamique du cycle
du carbone. Les projections de l'évolution climatique sur 30 à 50 ans
sont peu affectées par les incertitudes sur la modélisation des processus à
évolution lente. Ces projections sont particulièrement utiles pour répondre aux
préoccupations sociétales actuelles, aggravées par l'accroissement prévisible
des populations.
- L'évolution du climat ne peut être analysée que par de
longues séries de données, à grande échelle, homogènes et continues. Les grands
programmes d'observations internationaux, terrestres et spatiaux, doivent être
maintenus et développés, et leurs résultats mis à la libre disposition de la
communauté scientifique internationale.
- Le caractère interdisciplinaire des problèmes rencontrés
impose d'impliquer davantage encore les diverses communautés scientifiques pour
poursuivre les avancées déjà réalisées dans le domaine de la climatologie et
pour ouvrir de nouvelles pistes aux recherches futures.