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Colloque international plurisdisciplinaire "Espaces de vie, espaces-enjeux : entre investissements ordinaires et mobilisations politiques"



  • Co-organisé par RESO (UMR 6590) et le CRAPE, Université Rennes 2 et IEP de Rennes, 5-7 novembre 2008.

    Lieu : Université Rennes 2 et IEP de Rennes


    THÉMATIQUE TRANSVERSALE

    La dimension spatiale des rapports sociaux et politiques est habituellement abordée par les sciences sociales à travers des découpages disciplinaires et des problématisations conduisant à séparer ce qui relève des espaces de vie des acteurs sociaux et ce qui renvoie à la construction de problèmes publics (espaces-enjeux ou enjeux spatialisés) par les mobilisations collectives et les instances politico-administratives. L’objectif de ce colloque est d’interroger cette séparation et de réfléchir aux continuités et discontinuités mais aussi aux articulations entre ce que l’on peut appeler l’investissement ordinaire de l’espace et les mobilisations davantage organisées ou institutionnalisées, qu’il s’agisse de mobilisations « par le bas » (associations, collectifs, mouvements sociaux) ou « par le haut » (instances et dispositifs d’action publique).

    L’idée directrice est que l’on peut distinguer plusieurs types ou niveaux ou régimes de mobilisation (d’investissement, d’engagement) relatifs à l’espace ou susceptibles de traductions spatialisées, allant de pair avec des manières différentes d’appréhender et de réguler les rapports sociaux, et que l’analyse des spécificités de ces types, niveaux ou régimes, ainsi que de leurs modalités d’articulation, constitue un objet d’étude important à plusieurs égards. Bien souvent, la question des mobilisations relatives à l’espace n’est traitée qu’à partir des mouvements sociaux, des conflits ouverts (d’aménagement, d’implantation, d’appropriation, d’usage), des controverses, des modes de constitution et de gestion des problèmes publics. L’intérêt de l’entrée proposée est d’ouvrir sur d’autres questionnements, en interrogeant en particulier les articulations et les clivages entre formes ordinaires d’investissement de l’espace et mobilisations politiques. Elle permet notamment de faire apparaître des enjeux non encore constitués en problèmes publics ou à peine émergents dans le débat public, restant cantonnés à la sphère privée et interpersonnelle. Elle conduit également à examiner la manière dont les associations, les mouvements sociaux, les instances et dispositifs d’action publique s’étayent ou pas sur l’expérience sociale des acteurs ordinaires, la catégorisent, la reconfigurent. En particulier, alors que l’on parle beaucoup de démocratie participative, quelle place effective fait-on aux acteurs sociaux dits ordinaires (en tant que pratiquants d’un espace, qu’habitants d’un territoire donné, que riverains d’un projet controversé, etc.) dans les procédures et dispositifs d’action publique ?

    Le thème du colloque prend toute sa portée lorsqu’on le rapporte à un certain nombre de transformations sociohistoriques. Mentionnons notamment des transformations culturelles marquées par des processus de détraditionalisation, allant possiblement de pair avec l’affaiblissement des ressources et régulations endogènes et souvent informelles des acteurs sociaux pour coordonner les usages ou réguler les tensions, conflits et controverses qui marquent leurs espaces de vie. Parallèlement, l’on peut mettre l’accent sur une réflexivité accrue à l’égard des modalités de structuration des rapports sociaux, qui se traduit d’un côté par une intervention croissante des acteurs publics et privés dans le tissu de la vie sociale – projets d’aménagement, d’implantation, de requalification, intervention dans les conflits d’appropriation et d’usage, enjeux de compétitivité des territoires, de développement durable –, de l’autre par une promptitude à la mobilisation autour d’enjeux variés, la contestation des savoirs dits experts et des orientations privilégiées par les acteurs politico-administratifs.

    Ces différentes dynamiques de transformation conduisent à s’interroger sur la façon dont s’opèrent les régulations des pratiques et rapports sociaux inscrits dans l’espace et qui renvoient simultanément à des espaces de vie et à des enjeux de mobilisation politique par le bas ou par le haut. Comment les acteurs ordinaires traitent-ils les épreuves liées à la co-occupation de l’espace (gêne, trouble), quel type d’expérience de l’altérité, quelles formes de régulations régissent leurs rapports, y compris dans leurs dimensions de violence symbolique, de cautionnement d’inégalités et de rapports de domination ? Quels types de déplacement et de reconfiguration les formes de mobilisations politiques opèrent-elles, en particulier à travers des cadres militants, scientifiques, techniques, gestionnaires d’appréhension et de traitement des questions et des espaces, mais aussi à travers le développement de scènes publiques de controverses ou de concertation ? Assiste-t-on à des phénomènes de rigidification et de conflictualité ouverte croissante (dont témoigneraient en particulier des dynamiques de juridicisation et de judiciarisation) ? Voit-on se développer des ruptures tendancielles à l’égard du passé – par exemple, développement de bases de loisir spécialisées en lieu et place de la multifonctionnalité des espaces agricoles – ou des formes de continuum entre les logiques et régulations endogènes des espaces de vie et celles associées à l’univers de l’action publique ? Telles sont quelques-unes des questions que ce colloque souhaite aborder.

    Un autre ensemble d’interrogations fécondes porte sur les jeux d’échelles et les enchevêtrements d’échelles spatiales associés aux différents niveaux et types de mobilisation. Cela conduit à examiner l’articulation entre l’espace effectif de mobilisation des acteurs (les lieux concrets où ils agissent) et l’espace de référence de leur mobilisation (les territoires d’identification ou de compétence qui sont au fondement de leur action). L’objectif sera de dépasser les lieux communs comme celui du brouillage des niveaux d’action ou encore les dichotomies commodes – telles que celle du global et du local – qui dispensent de réfléchir sur les articulations opérées par les acteurs, leur inventivité à se positionner dans des contextes d’action présentant parfois des contraintes ou des opportunités inédites.

    Le thème du colloque appelle logiquement une approche pluridisciplinaire visant en particulier à confronter les problématisations élaborées par la sociologie, la géographie sociale et la science politique.
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